Après la révocation de l'édit de Nantes, les protestants restés en France et refusant de convertir au catholicisme, n'ont plus eu pour temples que les cavernes et les bois, où ils se réunissaient clandestinement, afin de célébrer un culte à leur Dieu : c'est cette période qu'on a appelée l'Église du Désert. Claude Brousson (1647-1698) a été la principale figure des pasteurs qui se déplaçaient de cachette en cachette pour prêcher à ces assemblées de misérables persécutés, illettrés pour la plupart. Brillant avocat, il aurait pu mener une vie confortable en exil, comme beaucoup de ses collègues qui avaient fui le royaume, mais Dieu lui avait mis à cœur ce ministère spécial de consolation et d'exhortation auprès du faible résidu des réformés de France. Dès lors, traqué partout comme un malfaiteur, le récit de ses interventions dans les réunions secrètes, de ses fuites, de ses séjours dans les cavernes, fait immanquablement penser à la description que l'épître aux Hébreux donne des souffrances endurées par les héros de la foi. On reste sidéré de l'activité prodigieuse que le doux apôtre du Désert a su déployer dans ces conditions : voyages à l'étranger pour plaider le rétablissement des droits des protestants, lettres, requêtes, livres entiers, sermons, prédications incessantes. Finalement dénoncé et arrêté, il subit le martyre à Montpellier, devant une foule en pleurs. Comment prêchait-il ? Plusieurs de ses sermons nous ont été conservés dans un recueil intitulé La Manne Mystique du Désert (l'adjectif mystique signifiant dans le contexte de l'époque "spirituel" par opposition à terrestre, ou matériel). La Colombe Mystique (la vraie Église) est sans doute l'extrait de cet ouvrage qui a été le plus cité comme exemple de la prédication de Brousson ; le sermon Les Brebis Mystiques (discernant les vrais pasteurs, d'avec les loups ravisseurs), nous permet pour sa part de bien comprendre la complète opposition qui existait alors entre la foi biblique des protestants, et la religion romaine qu'un monarque absolu prétendait leur imposer.