Le dicton du peuple

Toutes les religions

sont bonnes !

et la réponse de Jésus-Christ

 


 

Un voyageur venait de régler la dépense faite par lui dans l'hôtel. L'hôtelier avait compté, pesé, examiné, à face et pile, sur la tranche et par le son, chacune des pièces d'or que le voyageur avait placées devant lui ; et enfin il avait dit :

" C'est juste. "

Avant de partir, l'étranger tira de sa poche un petit livre intitulé : De la vérité de la religion chrétienne, et le présentant à l'aubergiste, il lui dit :

" Vous lirez cela à loisir. "

L'homme regarde le titre et répond :

" Oh! monsieur, toutes les religions sont bonnes. "

Sans répliquer, le voyageur va chercher, dans un tiroir où se trouvaient des médailles de toutes les dimensions, une pièce à l'effigie du monarque régnant, et la jetant sur la table, où elle résonne d'un son étrange, il dit à l'hôtelier :

" Voulez-vous me changer cette pièce contre sa valeur ? "

L'hôtelier, étonné de ce son mat, prend la pièce, l'examine de tous côtés, la rejette et dit :

- Je n'en veux pas.

- Pourquoi ?

- Parce qu'elle est fausse.

- Toutes les pièces ne sont donc pas bonnes ?

- Non.

- Ainsi, en fait de monnaie, vous distinguez entre les pièces fausses et les autres ?

- Certainement.

- Pourquoi donc ne faites-vous pas la même distinction entre les religions ?

Pourquoi n'appelez-vous pas mauvaise la fausse et bonne la vraie ?

L'aubergiste ne répondit rien.

- Substituez, reprit l'étranger, le mot vrai au mot bon, et vous n'oserez plus dire :
" Toutes les religions sont vraies. " Et, si toutes ne sont pas vraies, toutes ne sont pas bonnes.
Ainsi nous avons tous un choix à faire parmi les religions comme parmi les pièces de monnaie : accepter la vérité, repousser l'erreur. L'indifférence à cet égard prouverait qu'on n'estime pas toutes les religions bonnes ; mais plutôt toutes mauvaises : cette adhésion banale ne serait au fond que de l'incrédulité. Avant tout, le vrai !

- Mais n'y a-t-il pas du vrai dans toutes les religions ?

- Et n'y a-t-il pas de l'or ou de l'argent dans toutes les pièces fausses ? les acceptez-vous pour cela ?
Non, vous les voulez pures, vous les exigez au titre légal. Si ce titre n'existait pas, vous choisiriez encore parmi ces pièces ; vous leur appliqueriez la pierre de touche pour reconnaître celles qui ont le moins d'alliage. Eh bien ! quand il s'agit de religion, ayez donc la même exigence. Si vous dites qu'il y a du vrai dans toutes, choisissez encore celle où il y en a le plus ; sans cela je le répète, votre indifférence dévoilera votre incrédulité.

- Mais ce qu'il peut y avoir de faux dans les religions, ce n'est pas l'important. L'important, c'est la morale. Or toutes les religions prêchent la morale.

- C'est-à-dire que la morale vous paraît importante, parce qu'elle recommande aux voyageurs et à vos voisins de ne vous faire aucun tort ; comme cette morale prend votre défense, vous prenez la sienne ; parce qu'elle protège votre intérêt, vous la jugez bonne. Mais tout le reste n'est-il donc rien ?
Par exemple suffit-il de prêcher la morale pour qu'on la suive ? et, parce que les prêtres de toutes les religions la recommandent, cela fait-il que tous les troupeaux s'y conforment ?
Non ; prêcher la morale n'est rien ? c'est la faire suivre qui est quelque chose ; or, pour la faire suivre, il faut donner des motifs puissants, de vrais motifs ; en un mot, pour que la morale soit pratiquée, il faut qu'elle soit soutenue par une croyance conforme à la vérité.
Eh bien ! cette croyance conforme à la vérité, quelle est-elle ? Est-elle de Mahomet ou de Jésus-Christ ? celle de Bouddha ou celle de Confucius ?
Ce ne peut pas être toutes à la fois, car ces croyances sont opposées. Si Jésus-Christ est le Fils de Dieu, Mahomet n'est pas son prophète.
La vérité ne peut pas se contredire ; il faut opter entre le oui ou le non.

- Ainsi, d'après vous, je devrais laisser là ma maison et courir le monde pour chercher, dans cette masse de religions, quelles sont les fausses et quelle est la vraie ?

- Avant de vous répondre, permettez-moi de vous faire moi-même une question : Avez-vous entendu parler de la Californie ?

- Oui, j'ai moi-même songé que je ferais bien d'y aller.

- Pour chercher la religion vraie ?

- Non sans doute, mais pour y chercher de l'or.

- Quoi ! vous avez été près de faire un voyage de deux mille lieues, à prendre la pioche, à travailler au risque de mourir de la fièvre, et tout cela pour un peu d'or que vous mangerez en quatre jours, et vous trouvez qu'un semblable voyage serait trop pénible pour découvrir la religion qui sauve pour une éternité ?
Convenez que votre préférence prouve que vous ne croyez guère à la possibilité de découvrir une religion vraie. Si vous aviez cette espérance, vous iriez jusqu'au bout du monde !
Mais rassurez-vous, cela n'est pas encore nécessaire. Avant d'aller examiner au loin, il convient d'examiner au près. Votre premier soin doit être de sonder la religion du pays où vous êtes, celle dans laquelle vous êtes né et qui cependant n'est pas la vôtre.

- Comment ? elle n'est pas la mienne ?

- Non, car, si vous jugiez la religion de votre patrie vraie, vous ne diriez pas : "Toutes les religions sont bonnes." Le fait est que vous êtes chrétien par votre nom, votre baptême, votre première communion, etc. ; mais vous n'êtes pas chrétien de persuasion. Ainsi ce que vous avez à faire d'abord, c'est d'examiner sérieusement le christianisme.

- Mais quel travail pour ce seul examen !

- Pas aussi long que vous croyez. Ainsi, sans avoir voyagé ni lu, vous savez que partout où le christianisme a percé, la lumière, les arts, la moralité se sont établis. Ce fait vient fortifier la preuve que le christianisme pourrait bien être la religion vraie. Je ne vais pas plus loin que la présomption, et je dis qu'elle doit suffire pour vous décider à l'examiner complètement et de plus près.

- Je n'en ai pas le temps.

- Quoi ! vous avez le temps de travailler pour vous enrichir, le temps de manger trois fois par jour, le temps de lire votre journal chaque matin, de causer le soir avec vos voisins, le temps de vous promener, de fumer votre pipe, et vous n'auriez pas le temps d'examiner si la religion qui vous offre le ciel et vous menace de l'enfer est fausse ou vraie ? Dites donc plutôt que vous ne voulez pas vous en occuper.

- Du tout, du tout ; mais je dis sérieusement que je ne puis pas donner tant d'heures à l'examen de la religion.

- Tant d'heures, dites-vous ?

- Oui.

- Combien est-ce tant d'heures ?

- Oh ! vous ne voulez que m'embarrasser !

- Du tout ; mais puisque vous ne pouvez pas donner tant d'heures, dites-moi donc combien vous en donnez déjà. Si le mot d'heures vous effraye, dites-moi combien de minutes par jour vous consacrez à l'étude de la religion. Et, si c'est trop encore, dites-moi combien vous y employez de minutes par semaine.
Vous vous taisez.
Convenez-en donc, vous ne vous en occupez ni peu, ni beaucoup, ni souvent, ni jamais.

- C'est qu'en vérité, quand je vois tant d'opinions diverses, tant d'églises différentes, je n'ose pas commencer un tel examen !
Je me dis : Qui a raison ? Est-ce l'Eglise romaine ? Est-ce l'Eglise grecque ? Est-ce l'Eglise protestante ? Et, quand j'aurais choisi une de ces trois serai-je janséniste ou jésuite ? calviniste ou luthérien ? grec orthodoxe ou grec schismatique ?

- Je vous propose un moyen de vous débarrasser de toutes ces questions. Ces églises, quelque diverses qu'elles soient, prétendent être conformes à celle que Jésus-Christ a établie.
Eh bien ! remontez tout simplement à Jésus-Christ et à ses apôtres immédiats. Contentez-vous d'examiner le livre unique qui sert de bases à toutes ces communions ; prenez le Nouveau Testament et jugez par vous-même. Quoi de plus simple, quoi de plus juste ?

- Mais je crains de ne pas bien comprendre ce livre.

- Avez-vous essayé de le lire ?

- Oh ! je l'ai tant repassé quand j'allais à l'école.

- Quoi ! c'est une lecture faite dans l'enfance et sous la férule, que vous croyez capable de faire connaître un livre religieux ! Tout à l'heure, vous aviez peur de ne pas le comprendre, bien que vous soyez un homme fait, et maintenant pour vous dispenser de l'étudier, vous alléguez l'étude que vous en avez faite dans l'enfance !

- J'avoue que je ne serai pas fâché d'âtre aidé dans cette lecture.

- Eh ! qui vous empêche de prendre autant ou aussi peu d'aides que vous voudrez ? Des livres qui expliquent l'Evangile sont-ils donc si rares ? Et ! si vous n'en acceptez aucun, l'Evangile par lui-même est-il donc si obscur ? Ecoutez quelques lignes prises çà et là dans ses pages :

Heureux ceux qui sont doux, car ils hériteront la terre !
Heureux les miséricordieux, c'est à eux qu'il sera fait miséricorde !
Heureux ceux qui ont le c\9Cur pur ; car ils verront Dieu !
Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés enfants de Dieu ! Si tu viens présenter ton offrande à l'autel et que là il te souvienne que ton frère a quelque grief contre toi, laisse ton offrande devant l'autel et va d'abord te réconcilier avec ton frère.
Aimez vos ennemis, priez pour ceux qui vous persécutent.
Quand tu fais l'aumône, que ta main droite ne sache pas ce que fais ta gauche.

Après avoir entendu de tels préceptes, sentez-vous que vous êtes loin de les avoir accomplis, et tremblez-vous devant la Parole de Dieu ?
Je le comprends mais rassurez-vous en écoutant ces nouvelles paroles de Jésus-Christ :

Je suis venu chercher et sauver ce qui était perdu.
Venez vous tous qui êtes fatigués et chargés, venez à moi, et vous trouverez le repos de vos âmes.
Apprenez que je suis doux et humble de c\9Cur ; chargez mon joug qui est facile et mon fardeau qui est léger.

Pleurez-vous sur vos fautes ? Jésus ajoute :

Va en paix ;
tes péchés te sont pardonnés.
Je donne ma vie pour mes brebis ;
mon corps est brisé pour la rançon de plusieurs, vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi ;
il y a beaucoup de places dans la maison de mon Père ;
que votre c\9Cur ne se trouble point. Je vous donne ma paix ; prenez bon courage ;
j'ai vaincu le monde ; celui qui se confie en moi, je le ressusciterai au dernier jour ; où je serai, vous serez avec moi.

Après le Maître, écoutez les disciples. Paul vous dit, toujours dans ce Nouveau Testament :
Il n'y a plus de condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ ;
nous sommes assurés que ni la vie, ni la mort, ni les anges, ni les principautés, ni les choses présentes, ni les choses à venir, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l'amour que Dieu nous a témoigné en Jésus-Christ.
S'il nous a donné son Fils, ne nous donnera-t-il pas toutes choses avec lui ? Les souffrances présentes ne sont rien, comparées à notre gloire à venir.
Que votre charité soit sincère, ayez le mal en horreur, soyez joyeux dans l'espérance, patient dans l'espérance, patient dans l'affliction, persévérant dans la prière.
Ayez les mêmes sentiments entre vous, n'aspirez point aux choses relevées ; marchez avec les humbles, ne présumez pas de vous-mêmes ;
s'il se peut, ayez la paix avec tous les hommes.
Attachez-vous aux choses invisibles, car nus savons que, si notre demeure terrestre est détruite, nous possédons dans les cieux une demeure éternelle qui n'est point faite de mains d'hommes ;
vous êtes sauvés par grâce : cela ne vient point de vous, mais de Dieu !

Je m'arrête, car il faudrait lire tout le Nouveau Testament, et j'en suis réduit à l'appauvrir en le citant par lambeaux. Mais, puisque vous craignez de ne pas assez bien comprendre ce livre pour décider s'il est vraiment divin, laissez-moi vous le résumer en quelques mots ; vous me direz ensuite s'il est probable que ce soit là une \9Cuvre humaine.

L'Evangile suppose l'homme altéré de bonheur, et le premier mot de Jésus-Christ  à ses disciples est celui-ci : Bienheureux ! bienheureux huit ou dix fois répété en quelques lignes. Or, je vous le demande, est-il vrai, oui ou non, que vous désirez être heureux.

L'Evangile affirme ensuite que la source de nos tristesses est en nous-mêmes. La cause de notre bonheur ou de notre malheur n'est pas dans l'habitation d'une demeure plus ou moins vaste, dans le service d'une table plus ou moins abondante, mais dans nos dispositions intérieures.
Nous souffrons plus par nos craintes, par nos fautes que par toute autre cause. Si nous pouvions être délivrés de nos appréhensions pour cette vie et pour l'autre, si nous pouvions avoir en un être tout puissant une confiance entière, si nous pouvions être délivrés de nos tourments de conscience, de nos terreurs de la mort, de l'incertitude du jugement ; enfin si nous pouvions être assurés d'une bienheureuse immortalité, nous serions dès à présent heureux !
Eh bien ! voilà précisément ce que l'Evangile vous apporte : il vous offre de vous confier pleinement, non pas en l'homme, mais en Dieu ; en Celui qui est assez puissant pour créer les cieux et la terre, assez bon pour avoir mis ici-bas tout à notre service.
L'Evangile vous offre le pardon de votre passé, la force de mieux faire l'avenir, les joies du ciel, le don de l'éternité ; et tout cela gratuitement ; le prix en est payé d'avance par Jésus-Christ mort pour vous sur la croix. Ce que vous avez à faire c'est d'accepter, c'est de vous confier à ce Sauveur. Que pouvez-vous désirer de plus ?
Et maintenant, je vous le demande, un livre qui répond aussi bien aux besoins de votre c\9Cur et de votre conscience ne porte-t-il pas, par cela même, le cachet de Celui qui vous a donné ce c\9Cur et cette conscience?
Ne sentez-vous pas que la confiance vous manque plus que le pain ?
Ne sentez-vous pas que vous êtes incapable d'effacer vos fautes ?
incapable de mieux faire à l'avenir que par le passé ?
Et n'êtes-vous pas heureux d'apprendre qu'une miséricorde infinie répare tout, subvient à tout, sauve tout ?
Voilà l'offre de l'Evangile : un salut complet, un salut présent, certain, éternel ! Je le répète, que pouvez-vous désirer de plus et de mieux ?
Et remarquez que ce salut que Jésus-Christ vous offre, d'autres l'ont accepté ; ils en sont heureux. Bien plus, ils en sont sanctifiés.
Oui, la marque divine imprimée sur cette promesse, c'est qu'elle a produit la sainteté chez ceux qui l'ont acceptée. Ce n'est pas ici une opinion ; c'est un fait :  l'homme changé, moralisé dans tous les siècles et dans toutes les contrées, quelle preuve plus belle et plus forte pourriez-vous exiger ?

Cher monsieur, je n'ai pas la prétention de vous avoir tout dit. Aussi je vous invite à lire vous-mêmes cet Evangile. Et quand vous l'aurez compris, goûté, accepté dans votre c\9Cur, vous saurez alors que ce n'est qu'en lui que se trouve la religion de la vérité.

 

Napoléon ROUSSEL
(1805-1878)


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