L'auteur lui-même ne savait pas trop quel titre donner à ce petit livre : il l'avait d'abord intitulé Who goes home ? (Qui retourne à la maison ?) puis The Great Divorce, sous-entendant le divorce entre la Terre et le Ciel, par allusion à William Blake. Malgré ces hésitations il s'agit d'un des ouvrages les plus remarquables de C. S. Lewis qui vous permet de saisir, en seulement une centaine de pages, à la fois le talent de l'écrivain, et la fécondité de sa théologie.
Récit allégorique dans lequel un autobus emmène des gens déjà morts, habitant la ville Enfer, jusqu'à l'entrée du Paradis, où ils vont subir une sorte d'examen de conscience destiné à savoir s'ils veulent y rester ou retourner en Enfer (d'où le titre très bien trouvé d'une traduction française parue en 1980, l'autobus du Paradis).
Comme on pouvait s'y attendre avec un tel scénario il s'est trouvé en milieu évangélique des critiques assez tatillons pour suspecter l'auteur de cautionner, sans vouloir l'avouer, l'idée d'un purgatoire. En réalité, comme Lewis le signale dans sa préface, il ne se préoccupe pas du tout d'imaginer comment les choses vont se passer dans l'au-delà. Tout ce qu'il décrit est déjà observable sur terre dans la psychologie humaine. C'est là où perce son talent.
Car qu'est ce qui fait le grand écrivain ? Pas seulement une belle plume, ou sinon il serait difficile de l'apprécier dans une autre langue, à moins que le traducteur ne possède lui aussi un style remarquable. Mais si l'on pense aux Balzac, aux Stendhal, aux Mauriac etc. il apparaît tout de suite que c'est leur capacité à comprendre les divers caractères humains et à les faire vivre, qui emporte l'appréciation unanime des lecteurs. Lequel des hommes connaît les choses de l'homme, si ce n'est l'esprit de l'homme qui est en lui ? écrit Paul aux Corinthiens. Lewis est de cette trempe, il a appris à sonder les recoins du cœur de l'homme (en observant le sien aussi). Or comme dans notre état actuel le trait qui nous marque le plus reste le péché, il n'est guère étonnant que les grands écrivains (chrétiens ou non), trouvent presque toujours leur sujet dans la peinture d'un vice.
Du fait de sa conversion authentique à Jésus-Christ, Lewis est aussi un théologien (même si certains lui refuseraient ce titre) : comme à tout chrétien l'Esprit de Dieu, qui seul connaît les choses de Dieu, lui a intérieurement confirmé ce que dit l'Écriture. Sa théologie personnelle, c-à-d la manière dont il s'explique et combine ces vérités bibliques auxquelles il croit, pourrait être appelée une théologie de la poursuite : Dieu, le Dieu Bienheureux, poursuit inlassablement par son Esprit les âmes humaines, parce qu'il veut les gagner à son amour et à sa joie. Sans doute la manière dont Lewis a lui-même plié devant Dieu, y est pour quelque chose.
C'est une théologie féconde parce qu'elle se déroule dans le temps ; son Dieu n'est pas celui d'une métaphysique statique où tout est déjà décidé et plié depuis longtemps, mais plutôt le Dieu biblique, se comparant lui-même à un chasseur traquant sa proie, à un pêcheur ferrant le poisson, à un berger parti à la recherche de celle qui est perdue. Qui dit fécondité, dit production d'histoires, Lewis est aussi un conteur, ce que ni le plaisir pris à lire ce livre, ni aucun théologien grincheux ne songeront à contester.
Clive Staples Lewis est mort en 1963, ses œuvres ne tomberont dans le domaine public qu'en 2033. Nous ne pouvons donc pas vous proposer de télécharger ce livre audio ; cependant, comme la loi n'interdit pas de lire un livre qui nous appartient à haute voix derrière un micro, vous pouvez toujours l'écouter AMDG*, en cliquant sur les boutons appropriés. Par ailleurs vous trouverez sur Youtube plusieurs versions de sa lecture en anglais, en recherchant le titre The Great Divorce.
Si vous désirez lire ce livre, nous vous le prêterons à titre amical, sous forme numérique : il suffit pour cela d'écrire à theotex@gmail.com, en vous engageant à ne pas le vendre ou à le diffuser. Vous pouvez d'ailleurs le feuilleter ici.
* AMDG : Ad maiorem Dei gloriam : Pour la plus grande gloire de Dieu, la devise des Jésuites 😊.